Digressions à l’italienne
Il y a quelques jours, l’enfant béni vint à moi de bon matin, armé de son plus joli sourire – celui qui annihile toute velléité d’échappatoire maternelle – pour me demander de lui préparer un tiramisu.
Il avait dans l’idée de s’en payer une tranche avant d’aller à l’école, le lendemain matin : léger, simple et digeste avant les tables de multiplication. J’ai tenté de temporiser : un pour ce week-end plutôt, non ?
Mais face à sa petite mine triste… J’avais 35 min devant moi, alors… Et beh… j’ai séparé les jaunes d’œufs, ajouté le sucre puis le mascarpone, balancé quelques framboises à la préparation. Oui, oui, je sais : sacrilège ! Mais c’est pas mauvais quand même.
Et puis, ça fait plaisir à Mini CEO.
Et Mini CEO, c’est… et beh… Ah, il mio bambino ! Il sole che illumina la mia vita, il più bello di tutti i tempi ! (pas certaine qu’une traduction soit nécessaire, mais bon, en gros : Mini CEO est le fifils à sa môman).
Bref. Le soir, j’exhibe fièrement ma création au moment du dessert. Et là, c’est le drame ! V’là-t’y pas que mon tiramisu tout juste sorti du réfrigérateur s’étale comme du beurre (salé – of course) sur une crêpe chaude un 15 août à Perros-Guirec !
Il était bon, dixit le fiston et son Pater mais il avait autant de tenue que Pete Doherty à un brunch dominical au lendemain d’un concert des Babyshambles. Et ça, et beh… ça m’a bien tourneboulé.
La nuit était tombée depuis déjà quelques heures sur la rive Est du lac d’Annecy quand je ruminais encore et encore cette sortie de piste culinaire.
Où avais-je donc bien pu patouiller ?
Et tandis que je remâchais cette histoire de « tiramisu », c’est l’Italie toute entière qui s’est invitée à mon insomnie, comme pour me rappeler qu’on ne s’attaque pas impunément à un monument national à coups de framboises surgelées et de café soluble :
Faire une virée à deux…. Dans le sud de l’Italie…
Ou alors, c’est juste que je suis une quiche en tiramisu… Peut-être que je ferais mieux de rester sur le bon vieux gâteau au yaourt, valeur sûre depuis la maternelle ?
Il n’était pas mal le dernier livre que j’ai lu … c’était quoi son titre ? Les Vittorini, de Stacy Depoisier… Oui, c’est vrai, j’ai bien aimé l’histoire et son ambiance dynastie mafieuse.
Au pire… un peu de gélatine et roule ma poule, non ? Oui, mais non. C’est comme mettre de la crème dans une carbonara : un aller simple pour l’excommunication.
Ça me fait penser qu’on pourrait se regarder « Le Parrain » le week-end prochain, histoire de rester dans l’ambiance poudre (de cacao !) et vendetta familiale. Ça, ça plairait à Charmant CEO.
Sarà perché ti amo…
À moins que ça ne vienne des biscuits ? Trop mous ? Je vais tâcher de trouver les vrais de vrai…
Je vais vous raconter, avant de vous quitter l’histoire d’un p’tit village près de Napoli…
Tiens, ce serait cool d’aller à Naples un jour. Pompéi et Herculanum, ça lui plairait sûrement, à Mini CEO !
Non mais, va au plus simple ! De l’agar agar ou de la gélatine. On s’en fout si c’est pas la véritable recette ! C’est comme pour le far breton aux pruneaux : ach… ein großer péché ! Une faute de goût qui fait jaser mais qui fait pas crever.
Laisse les gondoles à Veniseuuuuu
Oh… J’avais tant aimé Venise et son aqua alta ! C’était en quelle année déjà ? Qu’est-ce qu’on avait ri en remontant dans l’avion avec nos chaussures détrempées !
Et si ça venait du mascarpone ? Hum… Je suis sûre que c’est ça ; c’est le mascarpone qui m’a mis dedans. Faut que j’en trouve un meilleur probablement…
Il neige sur le lac Majeur… Ouais ! Faudrait qu’on aille faire un tour à Locarno. Le lac Majeur ! Merci Mort Shuman. Bon, c’est pas tout à fait l’Italie, mais on y cause la langue de Dante. Sinon, on pourrait tout simplement s’arrêter à Stresa… Les îles Borromées ! Bonne idée, faut que je fasse un tour sur Booking demain soir, tiens…
Est-ce que j’ai trop imbibé les biscuits de café ?
Tant pis pour la géographie, ce qu’ils connaissent de l’Italie, c’est juste vaguement les spaghettis et Rocco Sifredi…
C’était quand même vachement soporifique, la Chartreuse de Parme, non ? Ou alors c’est moi qui suis passée à côté du chef-d’œuvre. Mais quand même, Stendhal, c’était vraiment le roi de la digression… Et je sais de quoi je parle !
Des œufs hyper méga frais, obviously ! Ouais, enfin… c’était le cas, hein. Cueillis à la source, ou presque !
Des verres à eau en verre de Murano, ce serait sympa… En même temps, regarde ce que j’ai fait des derniers verres à vin…
C’est moi, c’est l’Italien, je reviens de si loin…
En même temps, j’ai fait comme j’ai pu avec mon café soluble…
Dormi, mamma ti prega ! (en gros : « mais dors, Perfetti ! »)
O mio babbino caro…
Ouais, bah tu sais quoi ? La prochaine fois, je vais me contenter d’une Panna cotta.
E basta !