Fait trop chaud !

Annecy, 10 h 00 du matin. 25 degrés à l’ombre et moi, déjà au bord de l’ébullition. Certains lèvent les bras au ciel pour bénir cette chaleur de juin qui s’installe comme une tante envahissante. Moi, je lève les yeux au ciel.

Oui, permettez-moi de tempérer l’enthousiasme ambiant — ce que je fais, au sens propre comme au figuré, toutes fenêtres closes, volets tirés et ventilateur à fond mais passés 34 degrés, je ne suis plus fréquentable. Ni par mes proches, ni par moi-même. Voyez, je suis délicate ; je préviens. Je me mue en une sorte de croisement entre une limace desséchée et un Jean Gabin qu’on aurait privé de café ; l’humeur tourne vinaigre, le corps surchauffe, le cerveau fond comme un reblochon sur la tartiflette.

Et pis c’est pas tout ! Depuis quelques jours, on ne voit même plus les montagnes. Une bouillasse blanchâtre et poussiéreuse nous entoure tel un mauvais filtre Instagram. La faute, semble-t-il, au sable du Sahara qui remonte et aux incendies du Canada dont les fumées viennent stagner par chez nous après avoir traversé l’Atlantique sans passeport ni visa. Gageons que l’éternel voile de pollution du bassin annécien y est aussi pour quelque chose…

Bref, toujours est-il que— paraît-il en face de chez moi, il y a une montagne. Cela étant, je suis mauvaise langue, j’avoue, moi qui rêve d’exploser le Semnoz à la dynamite, histoire de de m’offrir une vue panoramique…  Pff… Fait trop chaud !

Fait trop chaud et pourtant, nous ne sommes qu’en juin. Juin, « bordel » !

Je regarde parfois en soupirant ces êtres solaires, le sourire vissé au visage, évoquer « la belle saison » qui clament haut : « On est mieux ici qu’à Paris, quand même ! » des étoiles plein les yeux. Moi j’y vois plutôt un présage. Celui d’un monde qui se déglingue lentement à la chaleur de notre indifférence.

Parce qu’on y est. Le réchauffement n’est plus un concept, c’est une ambiance. On le respire, on le subit. Et pendant ce temps-là, il reste des climatosceptiques — ces champions de la pensée plate, à qui il faudrait faire passer l’été dans une serre fermée avec une doudoune, la dernière conférence du GIEC en boucle dans les oreilles et un demi-verre d’eau tiède.

Je tente de me rassurer. D’ici quelques semaines, je plierai bagage avec homme et enfant. Direction l’Ouest, le granit et les embruns. Mon rocher breton m’attend, fidèle, et surtout à 23 degrés à l’heure du café.

Je ne sais ce qu’il adviendra du mois d’août. Mais si je tombe sur un climatosceptique le 15 août, va falloir qu’il réfléchisse avant de causer. Sinon je le sale et je le fume !

En attendant, je tente de me raisonner ; fête de la musique approche et en général, elle vire à la flotte.

Patience donc.

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